protocole 1

aller-retour


malo
malo
protocole 2

marcher à vélo
alors que je viens de me prendre en photo avec mon vélo sur le dos, afin de garder une trace de la performance, le propriétaire de la boulangerie d'à côté sort pour sa pose clope et se dirige vers moi.
tu m'étonnes, ça fait deux semaines que je veux aller lui parler et que je n'ose pas.
je pars, vélo sur le dos.
une femme et sa fille à l'arrêt de bus me regardent passer, l'air dubitatif. Un mec dans sa voiture redresse la tête.
mais pour la plupart, cette vision redevient vite banale car ils détournent bien assez vite leur attention de la scène qui, dans un entre-deux bancal, ne se déporte pas assez de la vraie vite quotidienne du réel pour exciter à ce point leur imagination.
j'ai mal au bras.
au cycliste qui passe devant moi je marmonne "you funny boy !".
où sont les caméras ?
et puis de mon côté je réfléchis au fait que je suis en train de porter mon vélo. Je pense qu'il est intéressant d'inverser la relation que j'entretiens avec l'équipement.
de premier abord, il me parait très incongru et malaisé de porter moi-même le vélo. Puis, je commence à trouver les bonnes prises.
je suis en train de créer un prototype de marche à vélo.
j'apprends très vite d'ailleurs, la marche à vélo.
il y a donc encore matière à réflexion.
protocole 3

vélo préparé
protocole 4

promener la roue
je décide ce jour de me rendre à la ressourcerie, à deux pas de l'école. Aujourd'hui, c'est moi qui vais porter mon vélo et non l'inverse.
je sors de chez moi et, à peine passé le pas de la porte, une première chose incroyable se produit.
je le salue et la discussion s'engage. Il est curieux de savoir pourquoi j'ai mon vélo sur le dos.
il connaît le mot "performance", mais pas les mots "trace" ou "documenter".
alors je lui explique. Je dis que j'étudie à l'ENSA et que je m'intéresse à ce qu'il fait. On parle de ses pains, sa farine, son business...
il m'invite à venir observer la conception des pains un de ces jours. Je suis carrément intéressé.
pas exactement, en fait. Je le tiens sur mon côté.
la selle est posée sur mon épaule droite. Je cherche l'exact endroit où le poids du vélo se fait le moins sentir sur mes os.

quelques regards. Je ne fais pas trop gaffe à l'attention que l'on me porte.
c'est comme s'ils voyaient passer un élément perturbateur, comme si quelque chose, l'espace de quelques secondes, était venu mettre du désordre dans l'ordre des choses établi.
un peu comme si, du coin de l'oeil, ils avaient cru voir quelqu'un marcher sur la tête...
je change de côté. Je trouve une meilleure position de la main sur le cadre du vélo. Je me rends compte que je peux supporter un peu de poids avec l'autre main.
mais j'ai quand même bien vite mal à l'épaule. Je m'arrête, tourne autour du vélo, change de nouveau de côté.
bien vite, je me mets à grimacer.

j'ai mal à l'épaule. Je commence à pousser des petits grognements.
je souffle. Je peste.
je vois un portail s'ouvrir. Le gars qui en sort regarde devant lui, puis à droite.
là, il prend un air surpris mais content et il se rue sur, apparemment, sa copine qu'il embrasse de façon très macho en lui tenant la nuque.
quand je les dépasse, j'entends des *smack* *smack* *smack* et je me dis : "qui embrasse comme ça ?".

je trouve tout cela très caricatural.
je réalise qu'il supporte mon poids, six fois supérieur au sien, tous les jours et qu'il est conçu pour ça.
je place ma main droite en bas du cadre.
je penche l'équipement de façon à ce que le guidon soit posé sur mon épaule gauche tandis que la selle repose sur mon épaule droite.
je courbe mon buste légèrement vers l'arrière et presse le vélo contre mon corps ; tant de façons d'alléger le poids que mes bras supportent.
comme j'ai appris il y a longtemps à tenir en équilibre sur la selle, je découvre maintenant quelle position de la main adopter, entre quels os caler le bout du guidon pour avancer de façon optimale.
je pense être parvenu à un prototype convenable. Mais je ressens une douleur au genou droit quelques centaines de mètres avant l'arrivée.
vélo-life